Ce sont les restes que le corps n’a pas assimilés. Elles nous inspirent le plus souvent le dégoût. Et pourtant, nos crottes sont d’une richesse étonnante! D’une part, elle nous en disent beaucoup sur notre état de santé. D’autre part, elles pourraient être source d’une nouvelle forme d’énergie!
Qu’y a-t-il dans nos excréments ? Une crotte, c’est un mélange d’eau (±75%), de restes de nourriture non digérés (±14%) … et de milliards de bactéries (±10%) contenues dans notre tube digestif ! Une crotte, c’est ce que le corps expulse après avoir extrait des aliments ingurgités tous les nutriments dont il avait besoin. Un processus tout à fait naturel, donc, dont la culturelle occidentale a fait quelque chose de répulsif…
Mais cette vision des choses est en train de changer, petit à petit. Les avancées dans le domaine médical comme dans les technologies y sont pour quelque chose… Et tout à coup, ces millions d’êtres vivants microscopiques qui vivent dans notre tube digestif, ces bactéries qui aident notre corps à décomposer et transformer la nourriture en nutriments ne sont plus vues comme les méchants microbes qu’il faut à tout prix détruire mais au contraire comme des éléments essentiels, à soigner aux petits oignons.
A l’origine de nos crottes : le charme discret de l’intestin
Il y a quelques années, le livre d’une jeune étudiante en médecine allemande est devenu un best-seller. Dans « le charme discret de l’intestin« , on découvre nos intestins sous un tout autre angle! L’auteure, Giulia Enders, explique notamment : « 95% de nos bactéries ne nous font pas de mal; la plupart nous aident. Vous pouvez améliorer votre intestin en nourrissant les bons microbes qui s’y trouvent, en mangeant de bons microbes de sorte à créer un meilleur écosystème dans votre intestin. Mettre plus d’énergie dans le fait d’avoir du bon et un peu d’énergie dans la protection contre les mauvaises choses. » Et si on accordait plus d’importance à cet organe digestif qui abrite notre « deuxième cerveau » ? Et si nos dépressions, mal être, maladies de peau trouvaient leur origine dans le mauvais fonctionnement de nos intestins ? Et si en en prenant conscience, on trouvait du même coup des solutions pour les soigner ?
Greffes d’excréments
La pratique est encore méconnue, et pourtant, la greffe de selles fait des miracles! Transplanter un microbiote fécal riche de bonnes bactéries permet de rééquilibrer une flore intestinale en mauvais état. Pour y parvenir, on transmet les selles d’un donneur sain dans le tube digestif d’un malade, le plus souvent par lavement ou coloscopie, pour guérir une infection. Dans certains pays d’Europe, aux Etats-Unis ou au Canada, les selles ont ainsi obtenu le statut de médicament! Et, partant du principe que la dégradation de la « flore intestinale » peut entrainer des problèmes digestifs mais aussi neurologiques, des chercheurs étudient la possibilité de procéder à des transplantations fécales pour traiter non seulement des maladies intestinales, mais aussi la maladie d’Alzheimer, le diabète de type 2, voire l’asthme ou la sclérose en plaques! Il existe ainsi des banques de selles… « organes » sans aucun doute plus abondants et plus faciles à trouver qu’un cœur ou qu’un foie!
Les excréments, du déchet à la matière
Mais la richesse des excréments n’est pas reconnue que dans le domaine médical! En matière énergétique, l’idée fait son petit bonhomme de chemin.
C’est dans l’air du temps : le principe de l’économie circulaire vise à transformer tout déchet en matière première! Pourquoi en serait-il autrement d’un déchet que l’espèce humaine génère à raison de près de 500 millions de tonnes chaque année ? Et si, au lieu de la faire disparaître d’un coup de chasse d’eau on utilisait cette matière sèche pleine de richesse ? Comme c’est le cas naturellement dans le monde animal : les excréments enrichissent le sol là où ils son déposés et participent au cycle de la vie… Comme le font également ceux qui ont adopté le principe de toilettes sèches, épandant leur produit sur leur potager. Car nos matières fécales sont riches !
Dans les pays occidentaux, cela contribuerait à résoudre le problème de l’assainissement des eaux usées et à diminuer l’utilisation inutile d’eau potable; dans les pays en développement, où manquent les stations d’épuration, cela réduirait les risques de maladies liées à la contamination des eaux potables. Parallèlement, cette matière première pourrait être valorisée en engrais naturel, en biogaz via la biométhanisation, ou en autres combustibles. Des chercheurs en tout cas se sont emparés du sujet.
Crottes, fèces ou bouses : zoom sur le monde animal
Aux quatre coins du monde, on donne déjà une deuxième vie aux cacas de certains animaux : le guano, le caca de chauve-souris, est utilisé comme engrais naturel, celui des pandas comme carburant ou les bouses de vache pour construire des maisons! Le caca vaut parfois de l’or, et ce de façon étonnante. En Indonésie, le caca d’une civette, le luwak, permet de fabriquer … le café le plus cher du monde !
Des crottes, il en existe de toutes les formes et de toutes les tailles dans le monde animal. On les appelle bouses, fientes, fèces, crottins … ou cacas ! Tout dépend de ce que l’on est, ce que l’on mange et … comment on le digère ! En observant ce que l’on trouve à l’intérieur d’un excrément, on peut identifier un animal. Dans l’exposition « Mon corps, ma santé », ce sont des crottes qui sont exposées dans la vitrine d’anatomie comparée de la zone consacrée au ventre. On y découvre ainsi la diversité des crottes, d’une espèce à l’autre! Et on apprend une série d’anecdotes qui amènent à voir les étrons sous un angle nouveau!
Ainsi, le bébé koala ou le jeune hippopotame mangent les excréments de leurs mères : en faisant cela, ils avalent des bactéries qui les aideront à digérer. Le lapin et le castor mangent aussi leurs crottes pour récupérer nutriments et vitamines !
Les crottes peuvent être des moyens de communication : c’est le cas du rhinocéros qui met beaucoup de nuances dans les odeurs de ses bouses ! Ou encore de l’hippopotame, qui marque son territoire avec son caca … en le lançant partout avec sa queue. A l’inverse, d’autres animaux prennent soin de cacher leurs excréments pour ne pas être découverts … comme le chat !
Pour les rapaces, le produit de la digestion ne se transforme pas en crotte, mais en pelote de réjection : les rapaces se nourrissent de petits animaux, les avalent en entier … mais ne digèrent pas tout ! Les poils, les os, les coquilles, les arêtes sont recrachés quelques heures après.
Désormais, vous ne regardez plus ni vos crottes ni celles de vos animaux préférés de la même façon…
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